mardi 13 juin 2017

Conférences Samedi 24 juin 2017

 
Antonio-Ryo SATO (Ordre des Prêcheurs, Strasbourg) 

Titre : La « contemplation existentielle » comme expérience authentique dans la religion selon Nishitani Keiji.


Résumé : « Surmonter le nihilisme à travers le nihilisme », c’est le thème sous lequel Nishitani Keiji (1900-1990) a cherché à redécouvrir le sens véritable de la religion. La modernité est arrivée à ne reconnaître aucune finalité providentielle à ce monde et à l’existence humaine. Selon Nishitani, il serait impossible de ne pas tenir compte de la réalité démontrée par les sciences modernes afin de revenir aux religiosités anciennes et désuètes. Toutefois, il trouve inacceptable que l’humanité continue à se déshumaniser de plus en plus par sa techno-puissance et à ne pas reconnaître le problème du nihilisme qui sape notre raison d’être. Si la religion peut avoir une valeur pour nous qui vivons l’histoire irréversible, elle doit pouvoir préciser son bien-fondé par rapport à la connaissance philosophique et scientifique qui repose, quant à elle, sur la raison autonome. En même temps, la religion ne doit pas se couper de la réalité indiquée par cette connaissance. Cela réclame naturellement que la religion ne se réduise pas à une foi qui rejette la raison humaine, autrement dit, qu’elle se débarrasse d’une certaine tendance fidéiste. Nishitani ne vise pas à faire cohabiter la connaissance rationnelle et la foi religieuse, ni à les mettre sur un pied d’égalité. Il ne s’agit pas non plus d’abolir simplement le fidéisme opposé à l’autonomie de la raison humaine. Pour lui, le sens véritable de la religion consiste dans une sorte d’expérience existentielle où le Transcendant absolument autre que moi est connu en moi comme Origine qui ne vient pas de moi-même. Cela est expérimenté par le moi qui se détache de moi-même en tant que sujet immuable ou ego réifié. Cette expérience est essentielle non seulement à l’égard de la connaissance rationnelle mais aussi à l’égard de la foi en tant qu’elle s’oppose à la raison. C’est en effet l’expérience existentielle qui se charge d’intégrer dialectiquement en elle-même ces deux instances opposées que sont la foi et la raison. Car on constate au sein de cette expérience que la négation absolue de soi devient affirmation absolue de soi par l’éveil à la subjectivité originaire. Ce qui revient à dire que la contemplation du Transcendant à l’intérieur de soi permet de se reconnaître dans le Transcendant. Cette contemplation fait ainsi vivre la liberté créatrice au milieu des pratiques de ce monde. Nishitani déclare que cela n’est rien d’autre que la mystique authentique réalisée par celles et ceux qui exercent la vraie « intelligence religieuse » englobant toutes les dimensions de la vie humaine.

KURODA Akinobu (Université de Strasbourg) 

Titre : Un autre dépassement de la modernité – le « sujet » de la « langue nationale » et son destin. 

Résumé : À l’ombre du slogan « Dépassement de la modernité », brandi par des intellectuels-phares de différents horizons, enthousiasmés outre mesure au lendemain de l’attaque de Pearl Harbor et rassemblés autour d’une table ronde sous ce titre en juillet 1942, et de l’effervescence ainsi provoquée par la publication de celle-ci chez le public japonais de l’époque, une autre remise en cause de la modernité s’effectue de façon beaucoup moins fracassante, mais non moins lourde de conséquences philosophiques sur le concept de sujet, dans le domaine de l’éducation de la langue nationale en Corée d’alors sous la colonisation japonaise.

Cette communication se propose de se pencher sur la question de savoir quel est exactement le statut du sujet parlant ou langagier dans la pensée linguistique de Tokieda Motoki. À travers une analyse conceptuelle par laquelle nous tentons de donner une réponse à cette question, nous souhaiterions montrer que la conception du sujet chez le linguiste japonais est susceptible d’être considérée comme une tentative de dépassement de la modernité. Après cette analyse, nous verrons un problème sérieux qui se pose au cœur même de sa théorie de la langue national quant à la position du sujet langagier individuel face à l’État.


La séance aura lieu : de 14h30 à 17h30 à l’Inalco, 65 rue des Grands Moulins, 75013 Paris, salle 5.21.